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Les « Terrasses Du Rocher », St Malo (France)

L’immeuble village

ARCHITECTE : Atelier Loyer

TECHNIQUE : VMZ Joint debout

ASPECT : QUARTZ-ZINC®

PHOTOGRAPHE : Jean-François Molliere

Fragment reconstitué du paysage malouin, l’immeuble des « Terrasses du rocher » développe une typologie riche et complexe, offrant à tous ses résidents une grande diversité d’habitat. Plus qu’un bâtiment, c’est un village entre boulevard et jardin de dunes qui s’est construit sur les ruines d’une ancienne imprimerie. Un projet conçu par l’atelier Loyer pour le compte du groupe Giboire. Depuis une trentaine d’année, les centres urbains perdent leurs industries. La fermeture, où, dans le meilleur des cas, le transfert des usines vers des zones suburbaines, libère de grandes emprises foncières qui deviennent souvent l’objet d’opérations d’aménagement d’envergure.

À Saint-Malo, les terrains de l’imprimerie Billon, fermée définitivement en 2009 après 81 années d’activité, ont été réaffectés à la construction d’un ensemble de logements. Bénéficiant de sa proximité avec le centre historique, à moins de deux cents mètres à vol d’oiseau, et d’une position restant centrale au regard de l’agglomération, le site se prêtait particulièrement bien à la réalisation d’appartements en accession. La municipalité a supervisé cette opération, réalisée par un opérateur privé, le groupe Giboire, maître de l’ensemble du foncier. Soucieuse de diversité architecturale, elle a imposé au promoteur l’organisation d’un concours entre deux équipes d’architectes, consultation dont l’atelier Loyer est sorti lauréat.

Le projet de l’agence rennaise adopte une typologie inédite, que l’on peut qualifier d’hybride. Côté sud, le long d’un boulevard en cours d’aménagement, l’immeuble à l’aspect d’un R+4 monolithique et longiligne. La façade nord, par contre, est une étrange colline faite d’un enchevêtrement de petites maisons rappelant l’architecture locale. Le nom de l’opération, les terrasses du Rocher, reflète cette proposition atypique.

Priorité au soleil

Désordre apparent, ordre caché : si les « simili-cabanes » de la façade nord semblent avoir été construites au fil du temps dans la plus pure tradition d’urbanisme vernaculaire, l’examen de la coupe révèle une simple organisation des étages en gradins. Éminemment moderne, cette typologie inventée par l’architecte Henri Sauvage dans les années 20 a rarement été exploitée, en dépit de ses avantages. En effet, grâce au retrait progressif des niveaux, la disposition en gradin permet à de nombreux appartements de bénéficier du soleil, et c’est d’abord pour cette raison que Philippe Loyer l’a utilisée pour le projet de Saint-Malo. Ici, le jeu des décalages d’étage apporte le soleil à une façade très défavorablement exposée au Nord-Est, et qui n’aurait pas pu profiter de lumière directe.

Avant de pouvoir mettre en œuvre ce système, Philippe Loyer a dû démontrer à son maître d’ouvrage le bien-fondé de sa proposition : « une partie du métier de l’architecte est de convaincre, les villes, les clients. Pour prouver que les habitants au Nord-Est de l’opération bénéficieraient des rayons solaires, j’ai réalisé une maquette en carré de sucre, puis j’ai placé un éclairage simulant le soleil d’hiver, très bas, qui n’est qu’à seize degrés au-dessus de l’horizon, et le soleil d’été, beaucoup plus vertical, s’élevant de 61° par rapport au sol ».

L’expérience a été concluante : l’hiver, les rayons solaires très horizontaux rentrent en profondeur dans l’épaisseur de la façade sud, dotée de profondes terrasses de trois mètres de large. Dès que le soleil remonte à l’horizon, les rayons atteignent les terrasses séparant chaque petite maison de la façade Nord-Est. Aujourd’hui très recherchés, ces espaces ouverts attenants aux logements illustrent aussi un credo de l’architecte, résumé dans une formule simple « le vide, c’est la vie ». « Nous n’habitons pas le plein, rappelle Philippe Loyer. Je pense que le métier de l’architecte n’est pas de construire le plein, mais bien de construire le vide ».

Une construction complexe

La volumétrie est conforme au PLU, explique l’architecte. Le règlement autorisait à monter jusqu’à trois niveaux plus un étage d’attique sur le boulevard. L’immeuble atypique obéit donc bien à la réglementation urbaine en vigueur, l’examen du plan confirmant une nouvelle fois qu’une grande rigueur est à l’origine de cette composition pittoresque. Une trame de murs de refend en béton espacés de six mètres forme la structure porteuse du bâtiment et règle le plan des appartements. Côté boulevard, de grands appartements de 3 ou 4 pièces avec terrasse linéaire. Côté nord, où un jardin inspiré des dunes a été aménagé, on retrouve les maisonnettes et leurs terrasses, qui sont en fait des appartements de deux pièces.

Si les immeubles gradins présentent des avantages, ils possèdent aussi leur lot de contraintes. La disposition génère un vide important au centre de l’immeuble, espace progressivement comblé par le retrait des étages. Au rez-de-chaussée, une partie de ce volume est occupé par des parkings. À partir du premier niveau, l’architecte a créé des pièces pouvant être utilisées comme débarras, cave ou local à vélo par les habitants, qui sont aussi invités à imaginer d’autres usages pour ces espaces en plus. D’un point de vue constructif, la typologie en gradin n’est pas une solution de facilité : elle complexifie plutôt l’opération, notamment le placement des gaines d’évacuation des eaux usées, qui ne peuvent plus se superposer — « plomber », comme on dit dans le jargon du métier - du fait du décalage des niveaux. La réalisation de réserves permettant de mettre le sol des terrasses en continuité avec celui des appartements était une autre source de complications.

Pour résoudre ces questions, les gaines ont dû être déviées à chaque étage : il en résulte une hauteur sous plafond plus importante que dans des opérations classiques : 2,70 m soit 20 cm de plus que les 2,50 m habituellement mesurés de dalle à dalle. Une générosité dont profite l’habitant sans que la facture constructive n’en ait été alourdie. Le prix de construction n’a pas dépassé les 1350 euros / m², rappelle l’architecte, parking en sous-sol inclus.

Du zinc pour « accrocher le ciel »

« Au final, le bâtiment compte bien plus de béton que de zinc, constate Philippe Loyer ». Pourtant, depuis la rue, les surfaces métalliques semblent faire jeu égal avec les murs d’enduit blanc. C’est, comme bien souvent, la convergence de critères multiples qui a conduit l’architecte au choix du zinc, dans un contexte ou l’ardoise règne. Le projet initial prévoyait une façade entièrement recouverte de différents types de zinc prépatinés. L’architecte désirait jouer sur les différences de teintes, mais à la demande du maire, il dut réduire la part métallique de l’enveloppe, puis revint finalement à une seule teinte de zinc gris clair, le QUARTZ-ZINC. Pas de regret de la part de Philippe Loyer. « J’aurai pu utiliser un zinc anthracite, plus proche de l’ardoise, mais je trouve que la teinte grise accroche beaucoup mieux le ciel de Bretagne. Par beau temps, le zinc offre du contraste, et les jours de grisaille, les toitures semblent se fondre dans l’horizon ».

« Il faut de la régularité, de la bizarrerie, des rapports d’opposition, un grand ordre dans le détail, de la confusion, du fracas, du tumulte dans l’ensemble… » (P. Loyer)

Le zinc n’habille plus l’ensemble de la façade, mais reste bien visible, en partie sans doute à cause d’une disposition du PLU, qui oblige l’utilisation de toiture en pente sur 70 % de la couverture. Il recouvre entièrement les « maisons sur le toit » occupant le niveau d’attique, et les « cabines » de la façade nord. Tantôt c’est le chéneau qui vient sur la façade, tantôt un pignon : ce jeu qui anime la volumétrie du bâtiment fait écho à la diversité des maisons malouines, qui adoptent indifféremment ces deux options. La variation facilite l’intégration de cet ensemble moderne dans un contexte plutôt traditionnel. L’architecte compare volontiers la façade nord à une sorte de prélèvement du paysage environnant. L’enchevêtrement des toitures et des terrasses était un autre élément plaidant en faveur de l’emploi du zinc « dans ces typologies complexes, les eaux pluviales doivent être parfaitement gérées. Pas question de déverser les trop-pleins d’eau sur la terrasse du voisin du dessous ! L’eau est conduite jusqu’au sol par un réseau continu de chéneaux et de gouttières, entièrement réalisé en zinc », observe P. Loyer, non sans rendre hommage à l’entreprise de couverture QUEMARD, qui a constamment fait des suggestions pour résoudre les nombreux cas particuliers inhérents à la typologie complexe du projet.

Philippe Loyer a engagé la seconde phase de l’opération, sur la parcelle attenante. La logique de diversité se poursuit. Ici des maisons seront fondées sur un bunker désaffecté. Depuis leurs fenêtres, les nouveaux arrivants contempleront peut-être les terrasses du rocher avec un brin d’envie, en pensant à ces résidents passant des vacances sans fin dans leurs drôles de cabanes de plages.

Les « Terrasses Du Rocher », St Malo (France)

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